LA FURTIVITE 5

                                           DÉTECTER LES AVIONS FURTIFS?

 Ben oui, c'est possible..

 Comme je l'ai dit au début de cette partie consacrée à la furtivité, il y a trois grandes «façons» de réfléchir les ondes électromagnétiques.

 1) Comme un miroir réfléchit la lumière.

 2) Comme une antenne qui capte et réémet ce qui n’a pas été «consommé».

 3) Par diffusion «tous azimut», phénomène qui se produit lorsque l’objet touché est beaucoup plus petit, que la longueur d’onde de l’onde incidente, ou présente des aspérités assez  petites par rapport à cette longueur d'onde.


 La réflexion type «miroir» est largement prépondérante lorsque la longueur de la partie concernée est bien plus grande que la longueur d’onde de l’onde incidente.


 La réflexion type «antenne qui réemet» est largement prépondérante lorsque la longueur de la partie concernée est de même ordre que la longueur d’onde de l’onde incidente (avec  une préférence pour une longueur «demi onde»).


 Et comme déjà dit, la diffusion est largement prépondérante lorsque la longueur de la partie concernée (objet entier ou aspérité) est petite par rapport à la longueur d’onde de l’onde  incidente..


 Les radars passifs:

 La furtivité repose donc (essentiellement) sur la réflexion, façon miroir, dans une direction "autre" que celle du radar, et sur l'absorbtion.

 La méthode "réflexion, façon miroir, dans une direction "autre" que celle du radar" est rendue possible par le fait que le radar est À LA FOIS l'émetteur et le récepteur, mais si on       séparait les deux d'une manière proche de celle ci:


 On voit clairement que les ondes réfléchies par l'avion furtif, peuvent être captées par l'un des radars, placés ailleurs, et qui ne sont pas l'émetteur. Ils peuvent même, mais ce n'est pas une obligation, être eux même "non émetteurs", et donc passifs.


On voit sur l'image qu'en fait, l'avion est détecté successivement par tous les radrars (éventuellement passifs) placés sur son chemin.





Remarque: l'émetteur peut aussi ne pas être un radar, mais une antenne quelconque, à l'origine d'une émission quelconque (émetteur de télévision, par exemple et entre autres), du moment que les radars passifs captent la fréquence précise de l'émetteur.

Le fait que les radars passifs ne soient pas "l'émetteur" empêche de mesurer la distance (par calcul du temps d'aller retour), et donc une bonne part de la position.......... sauf si plusieurs radars passifs, mais connectés, captent le même avion, ce qui peut permettre une triangulation.


Les radars VHF - UHF.

On l'a dit: c'est parce que la réflexion des ondes radar sur un avion furtif se produit très majoritairement "façon miroir" que la furtivité "due à la forme" est possible, mais si on pouvait faire en sorte d'augmenter fortement un autre "type" de réflexion, la furtivité de l'avion s'en trouverait amoindrie.

Quel autre type de réflexion?

La réémission après "captation" façon antenne.

Et pourquoi? Parce que, contrairement à la réflexion "miroir" qui se fait dans une direction précise, cet "effet antenne" produit une réémission PRESQUE* dans toutes les direction et donc aussi vers le radar.

(*)Presque, parce qu'il reste deux secteurs, deux "cônes" de silence d'environ 30° aux deux extrémités de ce qui sert d'antenne.


Le problème de cette réémission, c'est qu'elle n'est forte, et donc utile, que lorsque la taille de l'objet ou de la partie d'objet concerné est proche de la longueur d'onde du radar utilisé, avec un "pic" si la taille en question est celle de la demi longueur d'onde.


Les radars modernes utilisent le plus souvent des ondes dont la longueur d'onde s'exprime en cm, il est donc normal que la réflexion se fasse (presque) exclusivement "façon miroir," ou alors il faudrait trouver de minuscules parties d'avion.... qui seraient d'avance furtives de par leur toute petite taille justement (elles ne capteraient et donc ne renverraient que peu d'énergie).


Mais si l'on utilisait un radar dont la longueur d'onde s'exprimerait en mètres.... Donc travaillant en VHF (voir marginalement en UHF), ben là certaines parties d'un avion de chasse (canards, profondeur, dérives, saumons d'ailes, prises d'air, voir même quelques éléments plus ou moins internes faisant partie de la structure ou des gouvernes) deviendraient nettement plus détectables.

Si on ajoute à ça que les ondes UHF et VHF sont plus difficiles à absorber et transformer en chaleur......


Un bémol tout de même, ces ondes de fréquence plus basse (et donc de longueur d'onde plus grande), sont aussi beaucoup moins efficaces pour obtenir une image et une position très précises de la cible, bref, elles sont capables de détecter un avion furtif, mais très décevantes lorsqu'il s'agit de guider un tir....

Cela vient du fait que, pour avoir une précision acceptable, il faut un faisceau radar le plus étroit possible. Mais le radar n'émet pas un "vrai" et unique faisceau, mais plutôt plusieurs lobes.

On ne garde, bien sûr, que le principal, mais même là, ça peut ne pas être suffisant puisque l'angle de ce lobe, donc du faisceau, est proportionnel au rapport de la longueur d'onde sur le diamètre de l'antenne radar, et si les deux avions, à même distance, sont ensembles dans le faisceau, au même instant, ils ne seront pas séparés sur l'écran.


Bref, plus la longueur d'onde est courte (= fréquence élevée), plus le rapport longueur d'onde sur diamètre de l'antenne est petit, plus l'angle du faisceau est faible, et plus la précision est grande.

À l'inverse, plus la longueur d'onde est grande (ce qui justement permet de détecter les avions furtifs), plus le rapport longueur d'onde sur diamètre de l'antenne est grand, plus l'angle du faisceau est grand (large), et plus la précision est faible....


Voyons donc un peu comment marche la détection utilisant la réflexion par "effet antenne" utilisée pour contrer la furtivité grâce aux longueurs d'ondes plus grandes.


Il faut tout d'abord savoir qu'une antenne est un circuit oscillant.

C'est ce qui est montré dans l'image suivante:


Lorsque une onde électromagnétique frappe un objet conducteur, elle y génère un courant électrique qui tend à osciller à la méme fréquence.


En oscillant de la sorte, ce courant génère à son tour une onde électromagnétique, il y a donc réémission.


Si l'objet en question est allongé (genre "tige") et possède des dimensions de même ordre de grandeur que la longueur d'onde de l'onde

électromagnétique en question, alors l'effet est renforcé, surtout pour une longueur égale à la moitié de la longueur d'onde, parce qu'il y a

résonnance.



Une simple pièce allongée, comme le bord d'attaque de certains éléments de taille adéquate (prise d'air, empennage, canards, etc....), saumons d'ailes, mais aussi des barres*, tiges*, axes*, etc...., peut fonctionner comme une antenne, et donc capter une onde.

Mais puisque cette espèce "d'antenne" est aussi un circuit oscillant, elle va forcément réémettre une bonne partie de ce qu'elle a capté.

Elle va en fait réémettre ce qu'elle n'a pas consommé, c'est à dire qu'elle va réémettre avec l'énergie qui lui reste après les pertes inévitables (par effet joule).

(*) Oui, parfois certains éléments internes peuvent être concernés, si:

-Le revêtement (la coque autour) est fait d'un matériaux qui laisse passer une partie importante des ondes (certains composites, par exemple)

-Il y a un passage, même de faible dimension relative, possible pour les ondes (fente, espace "charnière" des parties mobiles).


Ci dessous, une illustration du principe:

En "1", la flèche verte indique la direction du faisceau d'un radar "conventionnel", c'est à dire travaillant avec des fréquences de plusieurs gigahertz, et donc dans des longueurs d'ondes s'exprimant en cm.
La longueur d'onde étant très petite par rapport à la partie de l'avion concernée ici*, la réflexion est de type "miroir" et se fait donc dans la direction indiquée par la flèche verte.

(*) L'exempe choisi ici est au bord d'attaque de l'aile, mais on peut appliquer le principe à d'autres parties de l'avion. 


En "2", la longue flèche rouge indique la direction du faisceau d'un radar VHF (ou bas UHF), c'est à dire travaillant avec des fréquences s'exprimant en centaines de mégahertz, et donc dans des longueurs d'ondes de l'ordre du mètre (de deux ou trois mètres à un peu en dessous du mètre).
La longueur d'onde étant d'un ordre de grandeur comparable à la partie de l'avion concernée ici* (idéalement une longueur d'onde double de la taille de cette partie), la réflexion est de type "antenne" (donc en fait captation/réémission) et elle se fait donc dans de multiples directions dont l'une est celle indiquée par la courte flèche (retour) rouge, donc vers le radar, ce qui permet de détecter l'avion.

(*) L'exempe choisi ici est au bord d'attaque de l'aile, mais on peut appliquer le principe à d'autres parties de l'avion.



Un petit point de détail: c'est sur ce principe que fonctionnent les antennes "rateau" de télévision, dites "antennes "Yagi".

Les différents éléments horizontaux sont autant d'antennes qui captent et réemettent le signal.

Du fait d'un processus que je ne décrirai pas ici, les éléments un peu plus courts réémettent essentiellement dans le sens de propagation de l'onde et les éléments un peu plus longs réémettent essentiellement dans le sens inverse.

L'élément récepteur (ou émetteur) se trouve entre les éléments un peu plus courts et le ou les élément(s) un peu plus long(s).



Les radars VHF - UHF détectent donc les parties d'avions de taille voisine de la longueur d'onde (en général de 3 mètres (100MHz) à 30 cm (1GHz, pour un matériel vraiment performant parce que ça devient vraiment petit) avec un pic à la demi longueur d'onde.



 Les radars de ce type sont, par exemple, P18, le KB Vostok E, les Nebo SVU et 55Zh6E (NNIIRT), etc...




Comme on l'a déjà dit, le problème de ces radars est leur faible capacité de localisation précise (parce que c'est lié justement à la longueur d'onde), mais au moins il "voient" l'ennemi arriver et peuvent tout de même permettre de décider de mesures adaptées.

D'un autre côté, on peut toujours imaginer un missile, initialement guidé de manière approximative, par un tel radar, puis terminant sa trajectoire guidé par un radar "traditionnel" (utilisant des fréquences plus élevées) parce que la proximité de la cible compensera sa faible détectabilité.


Sur le sujet de la furtivité, il y a quelques informations supplémentaires aux pages "quelques images4", "quelques images9" et "quelques images10".

Ces informations dans les liens donnés ci dessus, sont dans le cadre d'une description du Su57, mais elles restent valables en général.