LA FURTIVITE 4

On l'a vu, les faces latérales des avions furtifs peuvent être brièvement détectables lorsqu' un faisceau radar les rencontre perpendiculairement.

La même chose se passe pour le ventre de l'avion plutôt que son flanc.

L'avion, tout d'abord indétectable, sera brièvement détecté en passant juste en face du radar, puis disparaîtra à nouveau des écrans.

Cette détectabilité momentanée ne remet pas en cause la capacité de l'avion à intervenir furtivement, car la période de détectabilité est trop brève et apparaît souvent trop tard, l'avion étant déjà près de son objectif.

Que se passe-t-il pour un radar placé juste en face, ou juste derrière un avion ? Dans ce cas, toute arête ou face perpendiculaire au faisceau radar RESTERAIT détectable tout au long du vol, ou au moins tant que l'avion ne change pas de cap.

Les avion furtifs ne doivent donc présenter AUCUNE face ou arête perpendiculaire à la direction du vol. Comme ceux-ci:



Voici quelques prises d'air d'avions furtifs connus.

Au niveau des prises d'air, il y a un autre problème: même si ces dernières ont leurs bords en biseau pour éviter les réflexions vers l'avant, il reste... le compresseur qui, à l'intérieur de la prise d'air, renvoie les ondes vers l'avant presque aussi bien qu'une surface plane perpendiculaire à la direction du vol.

Il faut donc que le compresseur ne soit pas "vu" par le radar. Or, la plupart du temps il sont comme ceci:

On peut placer les prises d'air sur le dos de l'avion (exemple: le B2) pour qu'elles échappent aux radars au sol, mais ce ne sera pas suffisant pour les soustraire aux émissions radar en provenance d'autres avions.

Pour masquer le compresseur, on placera une chicane dans le canal d'entrée, comme ceci:

Il suffit, en plus, que les parois du canal soient couvertes d'une couche absorbant les ondes radar, et le tour est joué.

Sur le dessin, on peut voir que les ondes, peu importe leur direction d'origine (1, 2 ou 3) qui entrent dans le canal n'atteignent le compresseur, et ne ressortent qu'après plusieurs réflexions sur les parois.

Si ces parois sont absorbantes, il ne ressortira presque rien.

Remarque: s'il n'est pas possible de placer une chicane dans le conduit, il suffit que la distance entre l'entrée et le compresseur soit assez grande, et les parois absorbantes pour que seul un radar STRICTEMENT aligné sur la prise d'air soit capable d'obtenir un bon écho. Comme ici:

Seul le radar n° 2 peut obtenir un bon écho, les ondes des radars 1 et 3 subissent plusieurs réflexions sur les parois absorbantes perdant chaque fois beaucoup d'énergie.

Mais on peut faire beaucoup mieux encore en poussant plus loin le même principe. Pour cela, il faut placer, dans le canal, une jonction dans laquelle le conduit est divisé en une multitude de canaux parallèles beaucoup plus étroits, et absorbants, afin de pouvoir vraiment s'assurer que seule un faisceaux très très très bien aligné pourra éviter les réflexions multiples sur des parois absorbantes.

Comme sur le dessin ci-dessous:

On voit clairement que, même un angle faible (flèche verte), est déjà trop désaxé pour éviter les réflexions multiples dans la zone des canaux étroits et absorbants.

Cette technique est utilisée sur le F18 Super Hornet, et, semble-t-il, sur le Su 57.


Pour les tuyères, le problème est de concilier la furtivité aux autres impératifs spécifiques au type d'avion et à sa mission. Pour le F22, par exemple, il faudra compter avec l'usage de la poussée vectorielle (nous parlerons de la poussée vectorielle dans le chapitre consacré a l'hypermanoeuvrabilité), par contre, le B2 peut utiliser une tuyère plus furtive, et le F117 une "tuyère-fente" permettant une grande dilution des gaz éjectés, et donc une température moins élevée, et une moins grande vulnérabilité aux missiles à guidage thermique.